Eddy Thein, une vie militante

De Wikithionville
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Eddy habite à Thionville depuis toujours. Après son enfance passée au centre ville, il a rapidement habité à la Côte des Roses, et y vit toujours dans la maison où vivaient ses parents.

Après son enfance sous l'occupation (Eddy Thein, une enfance sous l'annexion allemande), Eddy nous raconte comment le travail, l'armée, et son passé, on fait de lui un militant. Un cheminement fait de découvertes et d'indignations, qui l'ont conduit à s'investir dans de nombreux combats.

Le plus important à ses yeux est aujourd'hui la fin du capitalisme et du productivisme, qui mènerait à la décroissance. Produire moins, pour vivre mieux, voilà le but qu'Eddy poursuit, avec quelques espoirs pour l'avenir.


Eddy Thein, une vie militante

Réalisation - montage : Juliette Loizeau Image: Thomas Guedenet - Sidney Lee Berthier



Eddy colleur d'affiches

Il a lui même collé chacune de ces affiches, parmi de nombreuses autres, et les conserve dans son grenier, mémoire de combats et de luttes.




Devenir militant

"Mon militantisme, ca vient de la vie que j'ai menée. Et puis, tout gosse déjà, je voulais savoir, comprendre ce qui se passait... C'est venu de là ! Quand j'étais aux petits scouts, on allait camper un peu partout, chaque année dans un endroit différent. Quand j'ai vu toutes ces régions, je voulais savoir ce qu'il se passait, en Bretagne par exemple, ou les paysans dans les Alpes... C'est venu aussi du milieu catho de gauche. Je lisais Témoignage Chrétien. Ils parlaient de la Palestine, du Liban, du Vietnam, de la Corée du Nord et ils parlaient aussi déjà de l'Amérique du Sud. Le militantisme est venu comme ca, peu à peu. Et voir comment les français travaillaient tout ça, ça ne me plaisait pas beaucoup. Moi, le travail, et puis l'heure (Eddy ne porte pas de montre...), il faut supprimer l'heure, et le travail ! Après on peut discuter ! Ce n'est pas venu des copains. Chez les scouts, il y avait une partie de la gauche, ils étaient social-démocrates. J'ai beaucoup lu sur la social-démocratie, sur le marxisme aussi, sur Lénine, tous ces trucs là. Et je suis venu au parti communiste révolutionnaire en opposition à la Russie totalitaire. D'abord, ils avaient dit : tous les pouvoirs aux soviets. Et quand ils ont vu que les soviets prenaient le pouvoir, ils ont eu peur de perdre la maitrise, et ont vite enlevé le pouvoir aux soviets. Tout ca, je l'avais compris à l'époque, mais sans être très clair. J'y ai ensuite réfléchi, et j'ai pu mieux analyser tout ca. Le parti unique ça ne résout rien du tout, car tu rabaisses la pensée des gens et tu les empêches de vivre comme ils veulent vivre. Et puis, ce qu'ils appelaient communisme, c'était du capitalisme d'état, ça n'avait rien de communiste du tout. Donc, c'est là dessus que j'ai commencé à réfléchir d'un point de vue politique, et c'est peut être le début de mon engagement. Et ce qui m'a le plus poussé vers le militantisme, c'est la colonisation. Et d'ailleurs, là aussi, Témoignage Chrétien avait fait des trucs formidables. C'est un travail de comprendre, et de chercher à savoir. Il faut lire des choses de différents horizons, pour te faire tes propres analyses et opinions. Ca ne se fait pas comme ça. En fait, il y a tellement de choses...parce que 68 aussi, c'était important. Je n'étais pas dans un parti, je n'ai jamais voulu rentrer dans un parti, avoir une carte, un machin...alors j'y allais comme je voulais. "

Voyages politiques

Eddy a parcouru le monde pour savoir, pour comprendre, voir ce qui se faisait ailleurs, pour analyser et imaginer une société différente. Son engagement et sa curiosité l'ont emmené au Liban, au Chili, au Portugal, en Espagne, à Cuba, en Algérie, en Albanie, en Serbie, en Tunisie... En 1972, c'est au Chili qu'il se rend avec une délégation de 150 personnes !

"Je suis allé au Chili en Septembre 72, juste après l'arrivée au pouvoir d'Allende. Le voyage était organisé par le PSU, le PS, Témoignage Chrétien... L'objectif de ces voyages, c'était la connaissance du pays d'un point de vue politique. C'était très politique. Chacun finançait son voyage. C'était cher mais ca valait la peine de le faire, tu voyais vraiment ce qui se passait. Le Chili, c'est quatre fois la France en long. Ca fait un sacré truc. C'était vraiment impressionnant. Là bas, on était transportés en avion. On est restés presque 15 jours, on avait des conférences, on rencontrait des gens. On logeait dans des maisons du peuple ou des hôtels, on était 150, il fallait une sacrée organisation ! On a visité une superbe ferme autogérée. C'était magnifique ce qu'ils avaient fait.


Tout autour de la capitale, Santiago du Chili, c'était entouré de bidonvilles, ca doit être encore pire maintenant... Tu marchais dans la boue. Il pleut beaucoup d'ailleurs. A cette époque, ca discutait beaucoup dans les rues, il y avait beaucoup de manifs, d'affiches...Les gens savaient qu'il allait se passer quelque chose. Dans les bidonvilles, on a été avec des prêtres ouvriers belges, qui vivaient là. Je les ai rencontrés car je connaissais un prêtre qui allait les voir. J'avais bien fait d'aller avec eux. J'étais plus catho, mais on apprend beaucoup plus de choses avec eux que d'aller faire le con dans des autres trucs... On a aussi rencontré des évêques, un responsable catho... C'était intéressant d'y aller. Son discours sur l'Eglise c'était vraiment mi-chèvre mi-chou. Mais ca ne fait rien. Quand on est rentrés dans la pièce où il nous recevait, il y avait une grande table en verre et ils avaient mis plein de photos. On voyait Fidel Castro, qui donnait une mitraillette à Allende. C'était...tu vois les contradictions qu'il y avait dans cette Eglise, ca devait être dingue.


Et puis, hormis la politique, quelques souvenirs du Chili... Dans la cordillère des Andes, il y avait les traces, les dessins faits par les Incas, c'était magnifique, ca m'avait beaucoup impressionné. Et puis les pelicans, qu'est-ce qu'on avait rigolé ! Quand ils se posent dans l'eau, c'est magnifique, et tu te fends la gueule !! Et puis, j'ai vu un requin coupé en morceaux... Et on a rencontré des chiliens. Ils en avaient bavés, et ils allaient encore en baver après... On avait été très bien accueillis par les paysans chiliens."